Il est des livres qui, l’air de rien, en font beaucoup plus que nombre de traités de psychologie, dits sérieux …
Nancy Huston est une romancière, d’origine canadienne, au succès largement établi, au style reconnaissable car bien souvent elle mèle plusieurs histoires, ou plusieurs époques, pour donner une densité particulière à ses personnages et aux événements décrits.
Parfois aussi elle publit des essais (et pour les amateurs de Romain Gary je recommande vivement le texte qu’elle lui consacre, ici), mais celui dont je souhaite vous parler aujourd’hui s’intitule L’espèce Fabulatrice (écrit il y a 10 ans et que je découvre vraiment tardivement …à quoi peut-on bien occuper son temps !).
Elle décrit la génèse de son livre à la suite d’une question posée par une femme incarcérée alors qu’elle anime des ateliers d’écriture dans la prison : « à quoi ça sert d’inventer des histoires alors que la réalité est déjà tellement incroyable ? ».
Tout son texte est une réflexion (qui n’a rien à envier à des ouvrages d’orientation constructivistes, ou à des thèmes issus des thérapies narratives) sur la façon dont nos pensées, nos croyances, celles dont nous héritons malgré nous par l’endroit et l’époque où nous vivons, ainsi que celles que nous nous forgeons avec le temps, batissent notre intériorité et identité. Facile à lire, souvent de courtes phrases qui font penser à des aphorismes, à méditer, comme celle-ci : « Nous sommes incapables, nous autres humains, de ne pas chercher du sens. C’est plus fort que nous ». Je vous laisse le plaisir d’en découvrir beaucoup d’autres, et l’ensemble du développement, jusqu’à sa conclusion, qui amène une jolie réflexion sur la façon dont on fonctionne.
A côté de cette réjouissance, et dans un tout autre domaine, la déception vient du dernier livre d’Antonio Damasio, L’ordre Étrange des Choses. Ce brillant chercheur a apporté des éclairages très intéressants sur le fonctionnement du cerveau et les avait retranscrits dans de superbes ouvrages de vulgarisation (dont l’accessibilité est tout de même relative), et je préfère conserver en mémoire ses premiers écrits comme : L’erreur de Descartes, ou encore Le Sentiment Même de Soi. Dans ce dernier texte (qui se veut une synthèse ?), rien qu’une reprise de ce qu’il a déjà dit et écrit, sans ajout (ci ce n’est, parce que c’est à la mode ?, quelques mots sur les résultats prometteurs de la recherche sur le système digestif, notre "2ème cerveau », édifiant !).
Quand je lis les platitudes que ce dernier écrit concernant l’homéostasie, je ne résiste pas, à vous faire partager la série d’entretiens qu’Henri Laborit a donné à Radio Libertaire en 1984 ( pour faire comprendre qu’il y a tellement autre chose à dire à propos de la régulation et de la notion de servo-mécanisme qu’il développe). En voici l’un d’entre eux (les autres sont facilement accessibles) :
et pour les passionnés, rendez-vous sur le site de Bruno Dubuc : l'Éloge de la Suite.
Bonnes lectures, à bientôt,